Lâchez-moi avec votre lâcher-prise

  • 23 Décembre 2018
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Face à certaines situations difficiles auxquelles je suis confrontée en cette fin d’année, une petite voix résonne dans ma tête : “lâche prise !”. Que dois-je en faire ? A quoi cela m’invite-t-il exactement ? Qu’est-ce que ça m’apporterait ? Et que risquerais-je de perdre ?

Parfois, j’ai  l’impression que, si je lâche prise, une part de moi, un peu lâche (facile, je sais, mais bon...), se résignerait. Elle me ferait abandonner quelque chose auquel je tiens, parce qu’elle manquerait de confiance, de courage ou de persévérance. Je ressens comme un goût amer. Et puis surtout, avec cette voix, j’entends une injonction de plus, un ordre un peu dissonant. On nous rebat tellement les oreilles avec ce lâcher-prise qu’il en devient presque toxique.

Qu’implique-t-il donc ? S’agit-il juste d’accepter, avec une certaine sagesse, qu’il y a des choses qui nous échappent, qu’on n’aurait pas prise sur tout, que nous ne sommes pas tout-puissants ? Ou serait-ce au contraire une invitation à baisser les bras, à perdre nos ambitions, à rester petits, modestes ?

Allez, lâche prise ! Et une injonction de plus, une...

Si on se réfère au Larousse, le lâcher-prise semble plutôt positif puisqu’il est défini comme un “moyen de libération psychologique consistant à se détacher du désir de maîtrise”.

Mais voilà, il est souvent présenté comme LE remède à toutes nos difficultés et, pire, comme un impératif. Car “il faut lâcher prise”, n’est-ce pas... Cela devient un diktat omniprésent. Il alourdit considérablement nos existences, comme un poids-lourd de plus dans un paysage chargé de multiples directives “pour une bonne vie”. Il faut méditer, il faut faire du yoga, il faut manger “paléo” comme nos ancêtres, il faut penser positif, il faut arrêter de stresser, il faut calmer ses émotions... Et, évidemment, pour éviter de succomber à tous ces ordres, “il faut lâcher prise”. Bon sang, mais c’est bien sûr... Il “fallait” simplement y penser !

De l’importance de distinguer acceptation et résignation

Dans certains cas, le lâcher-prise peut être vécu comme une résignation. Si nous sommes nombreux à considérer celle-ci comme une forme d’acceptation, une nuance importante s’impose. En effet, quand je me résigne, un sentiment de tristesse ou d’amertume demeure en moi. Alors que lorsque j’accepte pleinement, cela génère en moi des états d’esprits beaucoup plus positifs allant de la détente à la joie.

Il est peu de vertu plus tristes que la résignation ; elle transforme en fantasmes, rêveries contingentes , des projets qui s’étaient d’abord constitués comme volonté et comme liberté.
Simone de Beauvoir

“Dans la résignation, explique Pierre Portevin, nous renonçons à quelque chose qui nous paraît hors de portée. Mais nous en sommes contrariés, car nous abandonnons en même temps certains rêves, certains désirs auxquels nous tenons encore. Cela peut nous amener à nier nos émotions, nos souffrances, nos besoins. A nier notre propre réalité.

L’acceptation, au contraire, nous ancre dans le réel. Et nous arrivons à reconnaître celui-ci comme il est, sans chercher à masquer quoi que ce soit. Cette acceptation totale est un préalable à la réaction appropriée. Elle est le signe de notre liberté, alors que la résignation nous rend passifs, moroses, soumis.”

S’accepter soi-même

Allons un cran plus loin. Au delà d’accepter la réalité, le monde et les autres, tels qu’ils sont, un enjeu fondamental pour vivre dans la joie et l’enthousiasme consiste à s’accepter soi-même, tel qu’on est. “Le sommet du courage c’est d’accepter sa vulnérabilité” dit Alexandre Jollien. S’accepter dans sa vulnérabilité, comme le préconise également Brené Brown. Cela veut dire dans notre condition d’être humain, par essence imparfait et fragile, condamné tôt ou tard à souffrir et à disparaître.

Mais il importe de préciser rapidement que ce n’est pas parce que nous nous acceptons tels que nous sommes que nous n’allons rien faire pour que ça change, au contraire.

« Dès que je m’accepte tel que je suis, je change ; voilà un curieux paradoxe. »
Carl Rogers

Qu'est-ce qui vous donne envie de changer ?

Lorsqu’une personne se met en quête de changement, la motivation qui l’anime peut être de deux registres.

  • Elle peut désirer changer afin de devenir plus acceptable et appréciable (aux yeux des autres, ou à ses propres yeux). Le point de départ, c'est son auto-critique, ses reproches d’être comme elle est. Elle se dit que, si elle parvenait à atteindre un certain standard de qualité (dont elle s'estime encore loin, elle commencerait à être appréciable, à devenir “quelqu’un de bien”.
  • Elle peut aussi s’accepter et s’apprécier telle qu’elle est, et en faire son point de départ. Elle n’a pas besoin d’être autrement, de changer, pour obtenir ce sentiment bienveillant à son propre égard. Et c’est justement cette acceptation, ce sentiment bienveillant, qui lui donne envie de changer et qui la soutiendra dans sa démarche.

Les recherches nous montrent que cette deuxième source de motivation est bien plus solide et durable que la première. Au Japon, Shikata ga nai, l'art de l'acceptation, est considéré comme une clé pour affronter les difficultés de la vie. Il permet aussi de générer des changements positifs au niveau de l’organisme : régulation de la tension artérielle et réduction de l’impact négatif du stress.

De fait, l’acceptation est la base du changement. Sans elle, l’esprit s’en trouve perdu. Comment savoir vers où et par où avancer si je ne sais pas d’où je pars, et dans quel état je suis ? Comment persévérer si je n’apprécie pas la personne avec laquelle je progresse ? Oui, observer ce que nous sommes, ni plus, ni moins, nous connaître, nous reconnaître et nous apprécier dans notre imperfection, voilà une attitude décisive pour nous améliorer et évoluer.

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Au plaisir de vous retrouver tout au long de ce parcours.

Bonne fêtes de fin d'année et à bientôt...

Victoria